Introduction

Dachau est situé à 15 km de Munich. Bien qu'historiquement ce ne fut pas le premier camp pour prisonniers politiques créé par les nazis (les S.A. avaient de nombreux camps "clandestins" avant 1933), il fut le premier camp de concentration officiel créé par le nouveau régime.Le camp fut ouvert le 22 mars 1933 sur ordre personnel de Himmler. Dachau fut le centre d'écolage où de nombreux futurs commandants de camp tels Franz Ziereis (Mauthausen), Baranowski (Sachsenhausen), Anton Thumann (Majdanek et Gross-Rosen) apprirent leur horrible "métier". Rudolf Höss, futur commandant d'Auschwitz et Adolf Eichmann y firent leur premières armes. En outre, Dachau fut le lieux des pires expériences médicales faites par les médecins SS tels Sigismund Rascher, Claus Schilling ou le professeur Holzlömer. A la libération par les troupes américaines, il y avait encore 31432 prisonniers dans le camp principal et 36246 autres dispersés dans les kommandos annexes (le camp principal était sensé héberger un maximum de 11000 prisonniers à l'origine). Cette surpopulation s'explique par le fait que les nazis évacuèrent de nombreux camps devant l'avance des troupes alliées vers les camps situés au centre de l'Allemagne. On estime que près de 150.000 personnes moururent à Dachau. Parmi eux, près de 6000 prisonniers de guerre soviétiques.


"La libération de Dachau"

par Chuck Ferree

"Dachau... un mot à prononcer comme si on devait se nettoyer la gorge de quelques chose de sale. Dachau... Alors que nous descendions de notre Stinson L-5, nous sentîmes l'odeur. .. Nous sûmes alors mon passager et moi que ce mot nous glacerait le sang jusqu'à la fin de nos jours.

Nous étions au moins à trois kilomètres du camp, peut-être plus, mais déjà nous pouvions déjà sentir quelque chose de désagréable, d'indéfinissable. L'officier du SHAEF monta dans une voiture de commandement avec un autre général, et ils partirent. Je montai dans une jeep avec un sergent faisant partie de la 45ème division d'infanterie... la division Thunderbird qui avait été au combat quasi sans interruption depuis près de trois ans.

Nous suivîmes la voiture du commandant. Malgré un soleil brillant et le fait que je portais ma veste de vol, nous avions froid dans la jeep. Il y avait eu quelques chutes de neige la veille. Nous étions le 29 avril 1945. Le sergent commença à m'expliquer ce à quoi nous devions nous attendre lorsque nous serions arrivés à destination: Dachau, un camp de concentration nazi libéré le matin même. Je lui demandai ce qu'était cette horrible odeur. "Attendez d'être là-bas, ce sera bien pire" me répondit-il.

Dachau: une petite ville avec ses maisons bavaroises si typiques, avec des jardins proprets. Vraiment, rien ne nous laissait deviner ce que nous allions trouver derrière la porte d'entrée du camp.

Le premier endroit où me mena le sergent confirma les pires rumeurs: des wagons et des cadavres. Les histoires que nous avions entendues à propos des camps ne parlaient pas de ces pauvres cadavres émaciés entassés dans des positions grotesques. Ces pauvres gens avaient rencontrés la mort de façon absurde: le train chargé de déportés avait fui l'avance des troupes américaines. Le camp où ils devaient être transférés refusa de les admettre. Sans aucune nourriture ni eau, ils furent alors transportés de camps en camps pour finalement revenir à Dachau, leur point de départ. La grande majorité mourut lors de ce voyage de retour. Les rares prisonniers qui tentèrent de s'échapper des wagons furent abattu par les SS. Sur les corps, la forme des os apparaissait clairement sous la peau: en fait, il n'y avait plus aucune chair sur les os. La plupart des wagons étaient des wagons ouverts. La neige donnait aux cadavres un aspect fantomatique.

Le train de la mort

Nous passâmes ensuite le long d'une rangée de bâtiments imposants occupés auparavant par les responsables du camp et nous entrâmes par un large porte décorée d'un aigle impérial allemand. Les baraques à l'intérieur portaient des décorations reprenant la symbolique SS. Nous passâmes ensuite près d'un grand chenil. Ses occupants avaient été victimes de la rage des déportés récemment libérés: de grands et beaux bergers allemands gorge écrasée, la tête éclatée. Puis nous vîmes un bâtiment portant l'inscription "Bains", inscription destinée à tromper les prisonniers promis à la chambre à gaz. Des avertissement étaient peints sur les murs ainsi qu'à la porte: le signal international pour danger... une tête de mort et des os croisés.

En quittant la chambre à gaz, nous trouvâmes la preuve des monstruosités sans limites commises par les SS: des corps entassés pêle-mêle remplissaient deux pièces à rabord. Heureusement pour nous, il faisait froid: l'odeur des cadavres et des déjections aurait été impossible à supporter dans d'autres conditions. Ma lourde veste de cuir s'en imprégna pourtant.

Entre ces morgues bondées se trouvaient les crématoires dont quatre portes étaient béantes, prête à incinérer de nouvelles victimes. Dehors, nous trouvâmes des ossements et des tas de cendres: c'était l'endroit où les fours étaient vidés de leur horrible contenu. Derrière, une étable utilisée comme lieu de fusillade et où de nombreux déportés moururent sous le feu des pelotons d'exécution.


Dachau à la libération.

Cette ferme de la mort était séparée de la clôture principale par de hauts barbelés et un fossé. Le long de la clôture, une multitude de prisonniers à présent libérés nous exprimaient leur gratitude. Ils avaient été plus chanceux que les autres...

A travers l'eau sombre du fossé nous vîmes les corps de nombreux SS. Ces cadavres gelés étaient ceux des gardes SS tués par les déportés avant qu'ils n'aient pu se rendre aux troupes américaines. Au pied de chaque mirador nous trouvâmes de nombreux autres cadavres: des gardes SS qui avaient tenté de résister et qui furent abattus par les hommes de la 45ème division. Après avoir vu tant d'autres horreurs à Dachau, le seul "surhomme" qui tenait encore la tête haute était la statue d'un soldat SS sur le mur d'un bâtiment.

Après 3-4 jours à visiter Dachau, l'officier du SHAEF ainsi que les autres membres du groupe retournèrent par avion à Frankfort. Mon passager résuma ses impressions ainsi: "Bon Dieu, je me demande combien d'autre foutus endroits comme cela nous allons encore trouver."

Chuck Ferree